Histoire de la compagnie Tunisair
Tunisair avant l'indépendance de la Tunisie
La Tunisie s'est dotée d'une compagnie aérienne nationale après la seconde guerre mondiale mais avant ses voisins du Maghreb, l'Algérie (en juin 1953) et le Maroc (en juin 1956). Elle a donc été la plus réactive face aux besoins de relier par voie aérienne l'Afrique du Nord au continent européen et, plus précisément, à la puissance coloniale française, de même que d'inaugurer une ébauche de réseau entre les principales cités de la côte africaine de la Méditerranée. La naissance de la Société Aérienne Tunisienne de l'Air, intitulé officiel de la compagnie connue sous le nom commercial de Tunisair, se déroule dans un climat politique tourmenté.
Après la fin du conflit auquel la région a été mêlée en raison de sa situation stratégique du point de vue des Alliés comme de leurs adversaires, la Tunisie est toujours sous la tutelle de l'État français qui exerce son protectorat sous la menace des dissidents nationalistes qui entendent obtenir l'indépendance. Dans ces conditions de conflit larvé, Air France se propose de soutenir l'effort du territoire dans son accès à ce nouveau secteur encore balbutiant du tourisme qu'est le transport aérien de passagers espérant resserrer les liens entre la métropole et la Tunisie. Par un décret du 21 octobre 1948, Tunisair est fondée sur la base d'un partenariat financier entre l'entité tunisienne, Air France et des fonds d'origine privée. Le capital initial de la société est de 60 millions de francs. Faute de posséder une flotte aérienne en propre, Tunisair peut commencer son exploitation commerciale grâce à des avions affrétés auprès de son actionnaire français le 1er avril 1949.
À partir de cette date, Tunisair sera le principal vecteur du développement touristique de la Tunisie et, plus généralement, une branche primordiale de son secteur industriel. Mais les premières années de la compagnie Tunisair sont rendues difficiles en raison de l'atmosphère politique régnant alors. L'insécurité est omniprésente du fait des attaques rebelles contre les symboles du pouvoir colonial, situation peu favorable au développement du tourisme qui n'en est, alors, qu'à ses prémices. Un calme relatif revient dans les années 1953-54 quand le gouvernement français du président du conseil Mendès-France concède le statut d'autonomie interne pour le futur État (le 31 juillet 1954). Un an plus tard, le premier ministre tunisien Tahar Ben Ammar obtient d'Edgar Faure, devenu à son tour président du conseil à Paris, la signature de conventions qui conduisent à l'indépendance pleine et entière de la Tunisie le 20 mars 1956.
Les premières années de Tunisair aprés l'indépendance
La France ne conserve que la base militaire de Bizerte comme présence effective. En dépit de ces remous politiques majeurs, Tunisair peut commencer à réellement se déployer au cours de ces années, concrétisant sa vocation de compagnie nationale tunisienne par l'achat de son premier Douglas DC-4. Cet appareil quadrimoteur, construit dans les usines de Santa Monica (agglomération bordant Los Angeles en Californie et extrémité de la célèbre route 66) avait fait ses preuves durant la deuxième guerre mondiale dans sa version militaire puis, lors du blocus de Berlin par les russes, avait été employé au pont aérien entre la ville allemande et l'occident. Adopté sous sa forme civile par les principales compagnies aériennes, il avait donc largement contribué à l'essor de l'aviation civile, ce pour quoi il avait été choisi par Tunisair avec l'aval d'Air France. En 1956, deux autres unités du DC-4 avaient été acquises.
C'est à cette époque qu'une ligne régulière directe est créée entre Tunis et Paris. Dans le même temps, afin d'affirmer le caractère national de Tunisair, le gouvernement tunisien accroît sa participation dans la compagnie jusqu'à en devenir le principal actionnaire pendant que la part d'Air France diminue d'autant. Dans le même esprit, Tunisair est encouragée à promouvoir le personnel tunisien sur ses lignes. Souvent formés en France ou au Maroc, les navigants sont de plus en plus nombreux à être des nationaux et, en 1958, apparaissent les premières hôtesses de l'air tunisiennes parachevant la « tunisification » de la compagnie. L'État tunisien accroît ses parts dans le capital de Tunisair au détriment d'Air France et se trouve dès lors en position d'influencer les orientations commerciales prises par la compagnie.
Diversification de la flotte de Tunisair
Après les DC-4 de Douglas, Tunisair se dote d'une première Caravelle en septembre 1961. Cet avion de conception française, construit par l'usine Sud-Aviation, est équipé de deux réacteurs placés à l'arrière du fuselage. De ce fait, il est extrêmement silencieux et présente l'avantage d'être entièrement automatisé, fonction qui permet dans les cas de météorologie défavorable de décoller et d'atterrir en pilotage automatique. Tunisair est une des premières compagnies étrangères à en être pourvue après la première livraison faite à la compagnie belge Sabena six mois plus tôt. La Caravelle, qui avait été conçue en principe pour le marché américain trouvera toute sa mesure sur les marchés européens et africains. Sur ce dernier créneau, Tunisair participe grandement à la réputation de la Caravelle, appareil fiable et entièrement dédié au transport de passagers. Le modèle mis en service sur Tunisair peut transporter 76 passagers alors que, dans d'autre versions - notamment la « 12 » -, la Caravelle est susceptible de contenir jusqu'à 140 voyageurs.
Cette diversification de la flotte de Tunisair s'accompagne de l'inauguration de l'aéroport international de Tunis quelques mois plus tard, rendant une image de modernité à la compagnie comme au pays. L'aéroport de Tunis- Carthage - son nom officiel en hommage à la ville de Carthage, ancienne capitale de l'Afrique proconsulaire romaine - date de l'entre-deux guerres mais a été régulièrement agrandi et modernisé au cours des décennies. En 1962, il prend une véritable dimension internationale, les modifications portant à la fois sur les locaux d'accueil des passagers, mais aussi sur l'allongement des pistes qui pourront recevoir des avions nécéssitant des distances d'atterrissage supérieures aux normes de l'époque. C'est particulièrement le cas du Boeing 707 qui est alors un avion utilisé par la plupart des compagnies européennes et américaines.